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Un foyer n’est pas une maison

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« A Home Is not A House » ( Un foyer n’est pas une maison) parait in « Art in América » en avril 1965. Historien de l’architecture et du design, Reyner Banham (1922-1988) s’attaque à la maison américaine, ses mythes fondateurs, ses dérives technologiques. Les dessins de François Dallegret, designer et illustrateur français, soulignent les paradoxes techniques de l’équipement structurel abordés par l’auteur : la maison est réduite à un immense réseau où plomberie géante et télécommunication high-tech sont déployées par la grâce d’un enchevêtrement de tuyaux et de câbles. Et Banham pousse la chose à ses extrêmes, avec un contre-projet d’équipement transportable de « Un-house, Transportable standard-of-living package ». La dimension environnementale de l’espace défendue alors par Reyner Banham sera analysée en profondeur quatre ans plus tard dans l’ouvrage « The Architecture of the Well-Tempered Environment» (1969). Mais elle est ici paradoxalement transposée. Texte proposé et présenté par Catherine Geel.

Lorsque votre foyer contient un tel complexe de tuyauteries, de conduits, de gaines, de fils, de lumières, d’entrées, de sorties, de fours, d’éviers, de broyeurs d’ordures, de réverbérateurs hi-fi, d’antennes, de conduits, de congélateurs, de chauffages – lorsqu’il abrite tant d’équipements, que ce matériel pourrait tenir debout tout seul sans aucune aide de la maison, pourquoi donc avoir une maison pour l’accueillir ? Fig. 3 Et quand tout ce qu’a coûté cet équipement représente au final la moitié de la dépense totale (ou plus, comme c’est souvent le cas) investie dans ce foyer, à quoi sert la maison si ce n’est à dissimuler notre pudeur mécanique aux regards de ceux qui passent sur le trottoir ? À une ou deux occasions récentes, la confusion du public ne distinguant plus ce qui relevait des équipements ou de la structure devant certains bâtiments fut sincère – de nombreux visiteurs ont mis du temps à comprendre que les boîtes à gaines en brique qui flanquent les tours du laboratoire de Louis Kahn à Philadelphie1 Fig. 4 ne supportaient pas en fait leurs planchers, et le comprenant, ils se demandaient si cela valait bien la peine de concevoir une structure porteuse indépendante.

Il ne fait aucun doute qu’une grande partie de l’attention captée par ces bâtiments provient de la tentative de Kahn de mettre en scène et de dramatiser, en quelque sorte, ces fonctions techniques – et si, en fin de compte, il ne parvient pas à le faire de manière convaincante, demeure, au moins aux yeux de ses collègues architectes, l’importance psychologique du geste. Les équipements sont un sujet avec lequel la pratique architecturale a alterné de façon capricieuse entre l’effronterie et la timidité – il y a eu la grande période du « laissons-les-pendouiller », où chaque plafond était un fouillis d’entrailles gaiement peintes, comme dans la salle du conseil de l’ONU, et il y a eu des accès de pudeur lorsque même les détails anatomiques les plus innocents furent précipitamment voilés par un plafond suspendu.

Fondamentalement, il y a deux raisons à souffler tout ce chaud et ce froid (si vous voulez bien excuser un vieux jeu de mots2). La première est que les équipements mécaniques sont trop récents pour avoir été absorbés par la sagesse proverbiale de la profession : aucun des grands slogans – Form Follows Function, Accusez la structure, Firmness, Commodity and Delight, Truth to Materials, Wenig ist Mehr3 n’est d’une grande utilité pour faire face à l’invasion mécanique. Ce qui s’en rapproche le plus, et dans un sens assez négatif, c’est l’aphorisme de Le Corbusier « Pour Ledoux, c’était facile – pas de tubes », qui semble gagner en popularité comme expression de la profonde nostalgie d’un âge d’or avant que la tuyauterie ne s’installe.

La seconde raison est que devant l’invasion mécanique comme fait, les architectes – surtout les architectes américains – ressentent comme une menace culturelle pour leur position dans le monde. Les architectes américains ont certainement raison, car leur spécialité professionnelle, l’art de créer des espaces monumentaux, n’a jamais été solidement établie sur ce continent. Elle reste la greffe d’une culture plus ancienne à laquelle ils ne cessent de faire référence. La génération de Stanford White et de Louis Sullivan avait tendance à se comporter comme des émigrés français, Frank Lloyd Wright était même capable de s’abriter derrière des expressions sentimentales teutonnes comme Lieber Meister, les grands garçons des années 1930 et 1940 venaient de toute façon d’Aix-la-Chapelle et de Berlin, et les pacemakers des années 1950 et 1960 sont des hommes de culture internationale comme Charles Eames et Philip Johnson. Il en va de même, à bien des égards, pour les hommes d’aujourd’hui, comme Myron Goldsmith.

Laissés à eux-mêmes, les Américains ne monumentalisent pas et ne font pas d’architecture. Depuis le cottage de Cape Cod, en passant par la charpente à ballons, jusqu’à la perfection du bardage en aluminium plissé en permanence avec des stries en bois gaufré, ils ont eu tendance à construire une cheminée en briques et à y adosser une collection de cabanes. Lorsque Groff Conklin a écrit (dans The Weather-Conditioned House4 – La maison climatisée) qu’« une maison n’est rien d’autre qu’une coquille creuse… une coquille est tout ce qu’une maison ou toute structure dans laquelle des êtres humains vivent et travaillent, est réellement. Et la plupart des coquilles dans la nature sont des barrières extraordinairement inefficaces contre le froid et la chaleur… », il exprimait un point de vue extrêmement américain, soutenu par une tradition populaire établie de longue date.

Et depuis, la tradition s’accorde avec lui pour dire que la coquille creuse américaine est une barrière thermique inefficace, les Américains ont donc toujours été prêts à injecter plus de chaleur, de lumière et d’énergie dans leurs abris que les autres peuples. L’espace monumental de l’Amérique est, je suppose, le grand air – le porche, la terrasse, les plaines traversées par les rails de Whitman, la route infinie de Kerouac, et maintenant, le Grand Là-Haut. Même à l’intérieur des maisons, les Américains ont rapidement appris à se passer des cloisons dont les Européens ont besoin pour maintenir l’espace architectural et les liaisons intérieures, et bien avant que Wright ne commence à abattre les cloisons qui divisaient l’architecture de la bonne société en salon, salle de jeux, salle de télévision, salle d’armes, etc., les Américains les plus modestes avaient adopté un mode de vie adapté à des intérieurs planifiés de manière informelle qui étaient, en fait, de grands espaces uniques.

Aujourd’hui, les grands volumes simples enveloppés dans ces fragiles coquilles doivent être éclairés et chauffés d’une manière tout à fait différente et plus généreuse que les intérieurs cubiques de la tradition européenne autour desquels le concept d’architecture domestique s’est d’abord cristallisé. Dès le début, depuis le poêle de Franklin et la lampe à pétrole, c’est comme si l’intérieur américain devait être entretenu du mieux possible pour porter une culture civilisée, et c’est l’une des raisons pour lesquelles les États-Unis ont été le terrain d’expérimentation des services mécaniques dans les bâtiments – donc si les services doivent être ressentis quelque part comme une menace pour l’architecture, c’est bien en Amérique.

« Le plombier est le quartier-maître de la culture américaine », a écrit Adolf Loos, père de toutes les platitudes européennes sur la supériorité de la plomberie américaine. Il savait de quoi il parlait ; sa brève visite aux États-Unis dans les années 1890 l’avait convaincu que les vertus exceptionnelles du mode de vie américain résidaient dans son caractère informel (pas besoin de porter un chapeau haut de forme pour faire appel aux fonctionnaires locaux) et sa propreté – ce que ne pouvait manquait de remarquer un Viennois doté d’un ensemble aussi développé de compulsions freudiennes que Loos. Cette obsession de la propreté (qui peut devenir l’une des plus grandes absurdités de la culture américaine du Lysol5 et du Kleenex) est un autre motif psychologique qui a poussé le pays vers les équipements techniques. Les premières justifications de l’air conditionné n’étaient pas seulement que les gens devaient respirer : Konrad Meier (Reflections on Heating and Ventilating Engineering – Réflexions sur le chauffage et la ventilation, 1904) écrivait fastidieusement que :

des quantités excessives de vapeur d’eau, d’odeurs nauséabondes provenant des organes respiratoires, de dents malpropres, la transpiration, les vêtements mal rangés, la présence de microbes due à diverses conditions, un air étouffant provenant de tapis et de draperies poussiéreux… causent un plus grand inconfort et une mauvaise santé accrue.

(Allez vous laver, et revenez pour le prochain paragraphe.)

La plupart des pionniers de la climatisation semblent avoir été obsédés de cette manière par leur organe nasal : quand les meilleurs amis peuvent à peine aborder le sujet de l’odeur corporelle américaine – c’est pour ensuite, en vendeurs compulsifs, prescrire frénétiquement leur propre panacée pour la ventiler et l’évacuer. Quelque part parmi ces notions prises ensemble – la propreté, la légèreté de la coque, les services mécaniques, l’informalité et l’indifférence à l’égard des valeurs architecturales monumentales, la passion pour le plein air –, il m’a toujours semblé que se cachait un concept maître insaisissable qui ne pouvait pas être mis en évidence. Il m’est finalement apparu clairement et lisiblement en juin 1964, dans les circonstances les plus appropriées et les plus symptomatiques.

Je me tenais debout dans l’eau jusqu’aux poils de ma poitrine, en train de réaliser des films amateurs (j’ai cette façon très NASA d’emmener du matériel coûteux dans des environnements hostiles) sur la plage du campus de Southern Illinois. Cette plage allie le plein air et la propreté d’une manière très américaine – en apparence, c’est le bon vieux trou de baignade traditionnel de Huckleberry Finn, mais il est correctement surveillé (par des sauveteurs de deuxième année assis sur des chaises Eames sur des poteaux dans l’eau) et il est aussi chloré. De là où je me trouvais, je pouvais voir, non seulement des barbecues et des pique-niques familiaux immensément élaborés en train d’avoir lieu sur le sable stérilisé, mais aussi, à travers et au-dessus des arbres, les entrelacs de vannerie d’un des dômes expérimentaux de Buckminster Fuller Fig. 5. Je me suis alors rendu compte que si la vieille et sale nature pouvait être maintenue sous le bon degré de contrôle (du sexe oui, mais pas de streptocoques), les États-Unis seraient heureux de se passer complètement d’architecture et de bâtiments.

Bucky Fuller est, bien sûr, très attaché à cette proposition : sa célèbre question non rhétorique « Madame, savez-vous ce que pèse votre maison ? » exprime une suspicion subversive à l’égard du monumental. Ce soupçon est partagé de manière inarticulée par des milliers d’Américains qui se sont déjà débarrassés du poids mort de l’architecture domestique et vivent dans des maisons mobiles qui, bien qu’elles ne soient jamais déplacées, offrent néanmoins de meilleures performances en tant qu’abri que les structures ancrées au sol qui, elles, coûtent au moins trois fois plus cher et pèsent dix fois plus. Si quelqu’un pouvait concevoir un système qui permettrait de déconnecter efficacement le mobile home à l’alimentation électrique de la ville, des bouteilles de gaz perchées en toute sécurité sur une caisse d’emballage et des dispositions sanitaires semi-invisibles qui découlent du fait qu’il n’est pas raccordé au tout-à-l’égout, alors nous devrions vraiment assister à des changements profonds. On n’en est peut-être pas si loin ; les coupes budgétaires dans le secteur de la défense pourraient permettre d’accommoder les produits de l’aérospatiale assez rapidement dans de nouvelles directions, et ce genre de miniaturisation pourrait être appliqué à un ensemble de logements réellement autonomes et régénérateurs. Remorqués derrière une caravane ou fixés à elle, ceux-ci pourraient produire une sorte d’unité U-Haul6 qui pourrait être prise ou entreposée dans des dépôts à travers la nation. Avis pourrait bien devenir le premier dans le domaine de l’U-Tility, même s’il doit se contenter d’être le deuxième dans la location de voitures.

Il pourrait en résulter une révolution domestique à côté de laquelle l’architecture moderne ressemblerait à Kiddibrix7, car on pourrait aussi se passer de la caravane. Un ensemble de normes de vie (l’expression et le concept sont tous deux de Bucky Fuller) qui fonctionnerait vraiment pourrait, comme tant d’inventions sophistiquées, ramener l’homme à un état naturel en dépit de sa culture complexe (tout comme le remplacement du télégraphe Morse par le téléphone Bell a restauré son pouvoir de parole à l’échelle nationale). L’homme a commencé avec deux moyens de base pour contrôler l’environnement : l’un en évitant le problème et en se cachant sous un rocher, un arbre, une tente ou un toit (ce qui a finalement conduit à l’architecture telle que nous la connaissons) et l’autre en interférant réellement avec la météorologie locale, généralement au moyen d’un feu de camp, ce qui, dans une forme plus élaborée, pourrait conduire au type de situation dont nous discutons actuellement. Contrairement à l’espace de vie emprisonné avec nos ancêtres sous un rocher ou un toit, l’espace autour d’un feu de camp possède des qualités nombreuses et uniques que l’architecture ne peut espérer égaler, avant tout sa liberté et sa variabilité.

La direction et la force du vent détermineront la forme et les dimensions principales de cet espace, étirant la zone de chaleur tolérable en un long ovale, mais le rendement lumineux ne sera pas affecté par le vent, et la zone d’éclairage tolérable sera un cercle recouvrant l’ovale de chaleur. Il y aura donc une variété de choix environnementaux équilibrant la lumière et la chaleur en fonction des besoins et des intérêts. Si l’on veut faire un travail minutieux comme rétrécir une tête humaine, on s’assoit à un endroit, mais si l’on veut dormir, on se recroqueville à un autre endroit ; le Knucklebones8 se jouerait dans un endroit bien différent du lieu qui convient à la réunion du comité directeur des rites d’initiation… et tout cela serait parfait si les feux de camp n’étaient pas aussi inefficaces, peu fiables, fumants et tout le reste.

Mais un ensemble standard de vie correctement installé, expirant de l’air chaud le long du sol (au lieu d’aspirer le froid le long du sol comme un feu de camp), diffusant une lumière douce, une Dionne Warwick réconfortante en stéréo, des protéines bien vieillies produisant une lueur infrarouge dans la rôtissoire, et la machine à glace crachant discrètement des cubes dans des verres sur le bar pivotant – cela pourrait donner quelque chose dans une clairière ou près d’un rocher au bord d’un ruisseau que Playboy ne pourrait jamais faire dans son penthouse Fig. 6. Comment alors allez-vous déplacer ce gros morceau de technologie jusqu’au ruisseau ? En fait, il n’est pas nécessaire qu’il soit si massif ; les besoins aérospatiaux, par exemple, ont permis de réaliser des folies avec la technologie des semi-conducteurs, produisant même de minuscules transistors réfrigérants. Ils n’absorbent pas encore une grande quantité de chaleur, mais qu’allez-vous faire dans cette clairière de toute façon ? Mettre un bœuf entier en congélation ? Il n’est pas non plus forcément nécessaire de le manipuler : il pourrait se déplacer sur un coussin d’air (par sa propre production d’air conditionné, par exemple) comme un aéroglisseur ou un aspirateur domestique.

Tout cela, malgré les transistors, va consommer beaucoup d’énergie. N’oublions pas, toutefois, que peu d’Américains se trouvent loin d’une source de puissance comprise entre 100 et 400 chevaux : l’automobile. Des batteries de voiture renforcées et un tambour de câble à enroulement automatique pourraient probablement permettre à cet ensemble de respirer les vapeurs chaudes du bourbon bien avant que la transmission d’énergie par micro-ondes ou les centrales atomiques miniaturisées n’entrent en jeu. La voiture est déjà l’une des armes les plus puissantes de l’arsenal environnemental américain, et un composant essentiel d’un anti-bâtiment non architectural qui est déjà familier à la plupart dans ce pays – le cinéma en plein air par exemple. Le mot « maison » est donc manifestement mal choisi – il s’agirait simplement d’un terrain plat où la société exploitante fournit les images et le son, et où le reste de la situation repose sur des roues. Vous apportez vos propres excréments, votre chauffage et votre abri en tant que partie intégrante de la voiture. Vous apportez également du Coca-Cola, des biscuits, des Kleenex, des Chesterfield, des vêtements de rechange, des chaussures, la pilule et bien d’autres choses que Radio City ne fournit pas.

La voiture, en somme, fait déjà une bonne partie du travail du kit d’équipement standard de vie – un couple d’amoureux qui danse au son de la radio de sa décapotable garée crée une salle de bal dans la nature (piste de danse offerte par le service des routes, bien sûr) et tout cela est paradisiaque jusqu’à ce qu’il se mette à pleuvoir. Mais même dans ce cas, vous n’êtes pas fichu – il faut très peu de pression d’air pour gonfler un dôme transparent en Mylar, la sortie d’air conditionné de votre unité mobile pourrait y parvenir, avec ou sans un peu de renfort, et le dôme lui-même, plié en parachute, pourrait faire partie de l’unité. De l’intérieur de votre hémisphère de trente pieds de lebensraum chaud et sec, vous pourriez avoir des vues spectaculaires sur le vent abattant les arbres, la neige tourbillonnant dans la clairière, le feu de forêt arrivant de la colline ou de Constance Chatterley, courant rapidement vers vous savez qui à travers l’averseFig. 7.

Mais… ce n’est sûrement pas une maison. Peut-on élever une famille dans un sac en polyéthylène ? Cela ne remplacera jamais le traditionnel ranch à trois niveaux qui se dresse fièrement dans un paysage de beaux arbustes défaits, flanqué d’un côté d’un ranch à trois niveaux avec six arbustes et de l’autre, un ranch à trois niveaux avec quatre petits garçons et un dust bowl privé9. Si les innombrables Américains qui réussissent à élever de gentils enfants dans des caravanes veulent bien m’excuser un instant, j’ai quelques suggestions à faire aux Américains, encore plus nombreux, qui sont si peu sûrs d’eux qu’ils doivent se cacher à l’intérieur de faux monuments de Permastone10 et de toiture instantanée. Il y a, il est vrai, de très bons avantages quotidiens à avoir sous les pieds une moquette chaude sur un sol ferme, plutôt que des aiguilles de pin et du sumac vénéneux11. Les pionniers américains de la construction de maisons l’ont reconnu en construisant couramment leurs cheminées en briques sur une dalle en briques. Un dôme aérien transparent pourrait être ancré sur une telle dalle aussi facilement qu’un cadre de ballon, et le paquetage-de-vie-standard pourrait faire du sur-place dans une sorte de fosse à barbecue glorifiée au milieu de la dalle. Mais un dôme aérien n’est pas le genre de chose dans laquelle les enfants, ou un mangeur de citrouille distrait, entrent et sortent quand l’envie leur en prend – croyez-moi, si vous faites le mauvais choix, se battre pour sortir d’un dôme aérien peut être pire que d’essayer de sortir d’une tente effondrée et trempée par la pluie.

La relation entre le kit d’équipement et la dalle de plancher pourrait être réorganisée pour surmonter cette difficulté ; tous les équipements standard (ou la plupart d’entre eux) pourraient être redéployés sur le côté supérieur d’une membrane d’abri flottant au-dessus du plancher, rayonnant la chaleur, la lumière et tout le reste vers le bas en laissant tout le périmètre ouvert pour une sortie aléatoire – et une entrée tout aussi aléatoire, je suppose. Ce rêve fou du mouvement moderne de l’interpénétration des intérieurs et des extérieurs pourrait enfin devenir réalité en abolissant la porte. Techniquement, bien sûr, il serait tout à fait possible de faire littéralement flotter la membrane d’alimentation, à la manière d’un aéroglisseur. Quiconque a dû se tenir sous l’effet de sol d’un hélicoptère sait que cette solution est peu recommandée sauf pour ce qui concerne l’élimination instantanée des déchets de papier. Le bruit, la consommation d’énergie et l’inconfort physique deviendraient vraiment un truc sauvage. Mais si la membrane d’alimentation pouvait être transportée sur une colonne ou deux, ici et là, ou même sur une unité de salle de bains en brique, nous avons alors presque en vue ce qui pourrait être techniquement possible avant que la Grande Société ne soit beaucoup plus vieille.

La proposition de base est simplement que la membrane d’alimentation souffle un rideau d’air chauffé/refroidi/conditionné autour du périmètre du côté au vent de la non-maison que la météo importe dans l’espace de vie, et que la relation en plan avec la membrane au-dessus ne soit pas nécessairement une relation univoque. La membrane devrait, de toute façon, probablement dépasser les limites de la dalle de plancher, afin d’empêcher la pluie de pénétrer. Il faudrait qu’elle soit active précisément du côté où la pluie tombe, bien que le rideau d’air, en étant conditionné, puisse avoir tendance à éponger l’humidité entrante. La répartition du rideau d’air sera régie par divers capteurs électroniques de lumière et de profondeur, ainsi que par cette nouvelle invention radicale qu’est la girouette. Pour des conditions météorologiques vraiment difficiles, des volets anti-tempête automatiques seraient nécessaires, mais dans tous les climats, sauf les plus inconstants, il devrait être possible de concevoir un kit de conditionnement pour faire face, la majorité du temps, à la plupart des conditions météorologiques, sans que la consommation d’énergie ne devienne ridiculement plus importante que pour une maison ordinaire de type monumental inefficace.

Il serait sûrement encore sensiblement plus élevé, mais cet argument repose sur l’observation que c’est la manière américaine de dépenser de l’argent pour des équipements et de l’entretien plutôt que pour des structures permanentes comme le font les cultures paysannes de l’Ancien Monde. Quoi qu’il en soit, nous ne savons pas où nous en serons avec des choses comme l’énergie solaire au cours de la prochaine décennie. Et à tous ceux qui veulent s’amuser d’une vision presque possible de la climatisation absolument gratuite, permettez-moi de recommander Shortstack (un autre truc intelligent avec un tube de polyéthylène, dans le numéro de décembre 1964 d’Analog12 Fig. 8). En fait, un certain nombre d’objections évidentes et de bon sens à la non-maison peuvent se dissiper d’elles-mêmes : le bruit, par exemple, pourrait ne pas être un problème parce qu’il n’y aurait pas de mur d’enceinte pour le renvoyer dans l’espace de vie et, de toute façon, le murmure constant du rideau d’air fournirait un bon seuil d’intensité sonore que les sons devraient dépasser avant de commencer à être compréhensibles et donc dérangeants. Insectes, vie sauvage ? En été, ils ne devraient pas être pires que lorsque les portes et les fenêtres d’une maison ordinaire sont ouvertes ; en hiver, toutes les créatures raisonnables migrent ou hibernent ; et, de toute façon, pourquoi ne pas encourager les processus normaux de la compétition darwinienne pour régler la situation pour vous ? Il suffit de déclencher le processus au moyen d’un appât universel qui émettrait des cris d’accouplement et des odeurs sexy et attirerait ainsi toutes sortes de prédateurs et de proies mutuellement incompatibles dans un bassin compact pour un carnage indescriptible. Une caméra de télévision en circuit fermé pourrait retransmettre l’état du jeu sur un écran situé à l’intérieur de l’habitation et fournir un programme vingt-quatre heures sur vingt-quatre qui ferait passer l’audimat de Bonanza13 pour de la nourriture pour poules.

Et la vie privée ? Cela semble être un concept si nominal dans la vie américaine telle qu’elle est vécue dans les faits qu’il est difficile de croire que quiconque s’en inquiète sérieusement. La réponse que cet argument implique est la même que ce soit dans le contexte des banlieues ou dans celui des maisons de verre que les architectes concevaient avec tant d’ardeur il y a dix ans : un aménagement paysager plus sophistiqué. Après tout, c’est la patrie du bulldozer et de la transplantation des arbres Brown14 – pourquoi laisser le commissaire aux parcs s’amuser seul ?

Comme cela a été dit plus haut, cet argument implique la banlieue, l’endroit où, pour le meilleur ou pour le pire, l’Amérique veut vivre. Il n’y a rien à dire sur la ville qui, comme l’architecture, est une croissance étrangère peu sûre sur le continent. Ce dont il est question ici, c’est d’une extension du rêve jeffersonien au-delà de la sentimentalité agraire de la version usonienne/Broadacre de Frank Lloyd Wright – le rêve de la bonne vie dans la campagne propre, du power-point homesteading15 ou de l’agencement électrique au sein d’un jardin paradisiaque d’appareils. Ce rêve de la non-maison peut sembler très anti-architectural, mais il ne l’est qu’à un certain degré. L’architecture privée de ses racines européennes, mais qui tente d’en créer de nouvelles dans un environnement étranger, s’est déjà approchée de l’anti-maison une ou deux fois. Wright ne plaisantait pas quand il parlait de la « destruction de la boîte », même si la promesse spatiale de cette phrase s’est rarement réalisée. Des architectes de la plaine, comme Bruce Gal et Herb Greene, ont produit des maisons dont l’aspect monumental supposé n’a que peu d’importance par rapport à l’aspect fonctionnel de la vie à l’intérieur et autour d’elles.

Mais c’est dans un bâtiment qui, à première vue, ne semble rien d’autre qu’une forme monumentale que la menace ou la promesse de la non-maison a été le plus clairement démontrée – la Johnson House à New Canaan Fig. 9. Tant de choses ont été dites à tort (par Philip Johnson lui-même, ainsi que par d’autres) pour prouver qu’il s’agit d’une œuvre d’architecture dans la tradition européenne, que ses nombreux aspects intensément américains passent généralement inaperçus. Pourtant, même si l’on a fait le tour de toutes les publications érudites sur Ledoux, Malevitch, Palladio et autres, une source ou un prototype très suggestif reste plus difficile à expliquer : la persistance dans l’esprit de Johnson de l’image visuelle d’un township de Nouvelle-Angleterre incendié, les coquilles non substantielles des maisons consumées par le feu, laissant les dalles de briques et les cheminées debout. La maison de verre de New Canaan se compose essentiellement de ces deux éléments, une dalle de brique chauffée et une unité sur pied qui est une cheminée et son foyer d’un côté et une salle de bain de l’autre.

Autour de ces éléments s’est précisément drapé le type de coquille non substantielle dont parlait Conklin, mais en encore moins substantiel. Le toit, certes, est solide, mais psychologiquement, il est dominé par l’absence de clôture visuelle tout autour. Comme l’ont remarqué de nombreux pèlerins de ce site, la maison ne s’arrête pas à la vitre, ni à la terrasse, et même les arbres au-delà font visuellement partie de l’espace de vie en hiver, et physiquement et opérationnellement en été lorsque les quatre portes sont ouvertes. La « maison » n’est guère plus qu’un noyau technique situé dans un espace infini, ou bien un porche détaché donnant dans toutes les directions sur le Grand Dehors. En été, en effet, le verre serait un peu absurde si les arbres ne lui faisaient pas de l’ombre, et lors de la récente canicule, le soleil qui pénétrait à travers les arbres dénudés créait un tel effet de serre que certaines parties de l’intérieur étaient très inconfortables – la maison aurait été mieux sans ses vitres.

Cependant, lorsque Philip Johnson dit que le lieu n’est pas un environnement contrôlé, ce ne sont pas ces aspects indisciplinés du vitrage qu’il a en tête, mais le fait que « quand il fait froid, je dois me déplacer vers le feu, et quand il fait trop chaud, je m’éloigne tout simplement ». En fait, il ne fait qu’exploiter le phénomène des feux de camp et prétend également que le chauffage par le sol ne rend pas l’ensemble de la zone habitable (ce qui est le cas) et, de toute façon, qu’entend-il par environnement contrôlé ? Ce n’est pas la même chose qu’un environnement uniforme, c’est simplement un environnement adapté à ce que vous allez faire ensuite, et c’est le même geste humain de base que vous faites, que vous construisiez un monument qui soit un magasin, que vous vous éloigniez du feu ou que vous allumiez la climatisation.

Seulement voilà, le monument est une solution si stupéfiante qu’il m’étonne que les Américains soient encore prêts à l’employer, si ce n’est par un profond sentiment d’insécurité, une incapacité persistante à se débarrasser de ces habitudes de l’esprit quand ils ont quitté l’Europe pour les fuir. Dans la société ouverte, avec sa mobilité sociale et personnelle, l’interchangeabilité de ses composants et de son personnel, ses gadgets et son caractère presque universel, la persistance de l’architecture-comme-espace-monumental doit apparaître comme une preuve de la sentimentalité des durs.

Note du journal :

Reyner Banham, historien et critique d’architecture britannique, bénéficie actuellement d’une bourse de la Graham Foundation pour étudier le rôle des techniques mécaniques dans l’essor de l’architecture moderne. L’article « Un foyer n’est pas une maison » est produit à partir de cette recherche, et l’importance des illustrations de François Dallegret, architecte, designer d’origine marocaine et amateur de voitures, va au-delà de la note de bas de page, leur importance, selon Banham, « dépasse leur seule qualité graphique – elles démontrent que la crainte de nombreux architectes que l’acceptation de la domination des machines environnementales soit “la fin de la créativité” est fausse ».

Illustré par François Dallegret. Paru in Art in America, en septembre 1965, vol. 2, p. 70-79. © Rayner Banham 1965. Reprinted by kind permission of the Rayner Banham Estate.

Traduction de travail de Catherine Geel. Toutes les notes de bas de page sont de la traductrice.

Nous souhaitons remercier Edward Bottoms, Head of Archives, Architectural Association et le FRAC Centre.


Présentation par Catherine Geel : A Home Is not a House

Historien de l’architecture et du design, Reyner Banham (1922-1988) a définitivement marqué de son empreinte tout un champ des études sur le design et l’architecture. Si en France, quatre de ses principaux ouvrages théoriques16 sont maintenant traduits, lus et connus, il n’en va pas de même pour toute une partie de ses écrits, des articles, de courtes pièces qu’il rédige pendant toute sa carrière de critique et de professeur17. Souvent pleines d’esprit, l’impertinence ou l’humour y jouxtent la pertinence et la justesse. Ouvrir un volume de textes de Banham est toujours la promesse de sourires à la lecture. Flamboyant, caustique, critique, joyeux, curieux… Depuis leurs débuts de critiques en jeunes Turcs et comme membres de l’Independent Group, Reyner Banham et ses coreligionnaires18 se sont intéressés autant aux grands corpus de l’art ou de l’architecture qu’à toutes les productions possibles du monde industriel et de la culture populaire (le vernaculaire comme la culture de masse)19.

Banham réussit même le tour de force d’être historien et iconique tant par la façon dont il écrit que par son allure. Au-delà de sa silhouette élancée, sa barbe fournie et ses épaisses lunettes, son vélo pliable Moulton (une marque française) à Londres dans les années 1950 ou à Los Angeles dans les années 1970-1980, son appareil photo Fig. 12 et les images de ses rides dans les déserts californiens en font une figure que l’on distingue entre toutes. Il ne dédaigne pas à certaines occasions se mettre en scène lui-même20. Sa silhouette et les accessoires qui accompagnent le personnage sont bien connus et l’article fameux traduit ici n’y est pas pour rien. A Home Is not a House (Un foyer n’est pas une maison) est publié dans Art in America en avril 1965. Dans les illustrations à l’encre indienne sur film translucide de François Dallegret21 accompagnant et constituant A Home is not a House (Un foyer n’est pas une maison), Banham apparaît avec Dallegret dès l’entrée de l’article comme en médaillon Fig. 2. Puis, toujours avec Dallegret, il est nu et assis sur le sol, en mode « calumet de la paix » autour d’un équipement de télécommunication qui renvoie autant à un appareillage de contrôle qu’à un mini sound system-totem pour apache-hippie.

L’article célèbre traduit ici s’attaque à la maison américaine, ses mythes fondateurs, ses dérives technologiques. Les premiers se réfèrent aux feux de camp, le foyer au sens propre que Frank Lloyd Wright magnifiera en architecture, mais aussi au voyage, à la route, à l’habitation sur roues qui des chariots de pionniers en route vers la frontier intersecte le mobil home et l’avancée dans la prairie ou la route littéraire et débridée célébrée dans tous ses ouvrages par Kerouac [§6]. Les secondes rassemblent la mécanisation des fonctions, la folie des brevets, la climatisation, etc. Les dessins de Dallegret Fig. 3 soulignent le paradoxe technique de l’équipement structurel : la maison est réduite à un immense réseau où plomberie géante et télécommunication high-tech sont déployées par la grâce d’un enchevêtrement de tuyaux et de câbles pour irriguer un « ensemble baroque de gadgets domestiques », qui semble surplomber le foyer. Et Banham pousse la chose à ses extrêmes, le contre-projet d’équipement transportable de la Un-house, Transportable standard-of-living package ou de la Power-Membrane House Fig. 7 est abrité, à l’inverse, sous une bulle gonflable aux minces parois avec ses capteurs solaires. Les dimensions environnementales – qui ici ne veulent pas dire écologiques – de l’espace et ses équipements techniques sont paradoxalement transposées et offrent même la possibilité d’une situation parallèle au Benny’s Video (1993) de Michael Haneke Fig. 11 avec la retransmission des combats à mort d’animaux [§21]. Les questions environnement vs fonctions techniques et mécanisées sont, à l’époque où il écrit l’article, le sujet auquel Reyner Banham consacre ses recherches grâce à une bourse de la Graham Foundation et que l’on verra analysées en profondeur quatre ans plus tard, en 1969, dans The Architecture of the Well-Tempered Environment. Il participe, à cette même période, aux initiatives des étudiants de la Bartlett School of Architecture, University College, en contribuant aux cours alternatifs, à travers un programme parallèle qui mènera à la création de la School of Environmental Studies et en septembre de la même année, le chercheur écrit un autre article important, « The Great Gizmo » (Industrial Design, septembre 1965).

Le double ancrage de Banham, entre journalisme – il est, dès 1952, l’année de son Bachelor of Art (BA), engagé à temps partiel chez Architectural Review comme « literary editor » – et activités universitaires, donne à tous ses écrits la vitalité, l’immédiateté, et le concret souligné par Peter Hall22, mais aussi, de façon très anglaise, ce statut iconoclaste et une grande liberté dans sa posture académique. On voit à quel point les deux positions sont liées dans cet article satirique. L’enquête et le terrain sont primordiaux pour Banham qui tisse aux références théoriques et cultivées celles populaires – marques, émissions ou série T.V., pulp, etc. (§ 12 à §22) – qu’il regarde dans la tradition établie dans les années 1950 par les séminaires de l’Independent Group à l’I.C.A. Si les dessins de Dallegret devenus fameux sont intrinsèquement liés au texte, on peut souligner – en tout cas, ce fut le parti-pris de cette petite étude – l’importance de la documentation visuelle que rassemble l’auteur du texte en particulier avec la photographie Fig. 5 et Fig. 9. Et l’on peut même y relier l’expérience a posteriori du pique-nique amical et familial en 1967 sur le sol de la bibliothèque vide de la Faculté d’Histoire d’Oxford, pris en photo par James Stirling Fig. 12 alors que ce dernier était en train de livrer le bâtiment. C’est un exemple des pieds de nez dont Banham parsème son parcours, mais également une expérience – pique-niquer en intérieur sur le sol de béton immaculé d’une bibliothèque vide de tout ouvrage, que l’on peut regarder comme un équivalent inversé de la baignade sur la plage du campus de Southern Illinois que le professeur raconte dans son texte [§11]. Happy Christmas !


  1. Centre de recherches médicales Newton-Richards (1958-1961). (NdT)↩︎

  2. Le texte original dit exactement : « if you will excuse the air-conditioning industry’s oldest working pun ». Mais il a semblé que ce « plus vieux jeu de mot du monde » ne relevait pas uniquement pour nous de l’industrie de l’air conditionné. (NdT)↩︎

  3. Ce sont les langues originales utilisées dans le texte par Banham. (NdT)↩︎

  4. The Weather-Conditioned House. New York : Reinhold, 1958. Réédité en 1982. (NdT)↩︎

  5. Marque de produits désinfectants du groupe britannique Reckitt Benckiser. La marque est très connue en Amérique et notamment aux États-Unis. (NdT)↩︎

  6. Marque américaine de camions, de remorques et de box à louer et spécifiquement conçus pour les déménagements. Cette entreprise est créée en 1945. (NdT)↩︎

  7. Ou Kiddy Bricks. Jeu de construction pour enfant. (NdT)↩︎

  8. Le Knucklebones est un jeu ancien, proche de celui des osselets, qui se pratiquait à l’origine avec les os des articulations d’animaux tels que les moutons. On y joue encore aujourd’hui, avec des pièces métalliques et une petite balle en caoutchouc. Lorsqu’on les lance, les os ont tendance à atterrir sur l’un des quatre côtés, en évitant les extrémités courbes. Ce jeu pourrait être considéré comme une première version des dés, avec quatre valeurs de points possibles au lieu de six. Pour jouer, les gens lancent les os sur le sol et enregistrent leur valeur en points. Les Romains avaient un système de pointage complexe pour ce jeu, le score le plus élevé étant attribué à une « Vénus ». Certains jeux consistaient à répéter des figures présentées par un autre joueur, comme lancer trois os en l’air et les attraper tous sur le dos de la main. Le processus de lancer et d’attraper les os avait pour avantage d’aider les enfants à développer une bonne coordination œil-main, une compétence très utile. (NdT)↩︎

  9. Allusion aux tempêtes de sable (1934, 1936, 1939-40) qui conduisent à l’exode rural des fermiers et agriculteurs américains dont on connaît les images par les campagnes photo de la Farm Security Administration. Ces black blizzards (blizzards noirs) et ces sécheresses sont les conséquences de l’agriculture mécanisée et extensive. Les quatre garçons du texte sont les équivalents des moissonneuses-batteuses qui créèrent les problèmes d’érosion du sol. (NdT)↩︎

  10. PermaStone est un composé de moulage durable qui agit comme du plâtre mais qui sèche comme de la pierre ! dit la publicité du site. C’est un nom commercial tellement courant qu’il est presque devenu générique pour tous les matériaux semblables à du ciment appliqués sur les murs extérieurs et manipulés pour ressembler à de la pierre aux États-Unis, aujourd’hui encore. (NdT)↩︎

  11. Le sumac vénéneux est une plante sauvage commune qui, lorsque l’on y touche ou que l’on s’y frotte, provoque une réaction allergique extrêmement irritante. Cette plante peut entraîner une dermatite de contact – une éruption bulleuse s’étendant sur la surface de la peau touchée par la plante. (NdT)↩︎

  12. Analog. Science Fact • Science fiction est un pulp américain. Shortstack (p. 35) est une nouvelle dans laquelle Willy Short improvise un laboratoire et une ville sous plastique dans le désert à San Bernadino (près de L.A.). (NdT)↩︎

  13. Série américaine (1959-1973) qui se déroule après la guerre de Sécession. Ce western familial de 14 saisons est au comble de sa popularité entre 1964 et 1967, soit au moment où Banham écrit son article. (NdT)↩︎

  14. Le paysagiste Lancelot Brown (1716-1783) a transformé la conception des jardins anglais du xviiie siècle, avec l’invention d’une machine à transplanter les arbres, exceptionnellement efficace. Il a remodelé pour ses clients aristocrates les espaces entourant les demeures pour en faire des paysages verdoyants, que l’on pouvait apprécier depuis le confort de sa voiture ou depuis des points de vue pittoresques situés dans son domaine. Cependant, les arbres mettent des années à pousser et les jardins de Brown devaient arriver à maturité du vivant de leurs propriétaires, il fallait des plantations matures. Pour atteindre cette idylle sylvestre, il fallait des arbres semi-matures et avancés. Brown a conçu une machine qui était non seulement rapide mais permettait de transplanter assez facilement des arbres avancés de 15 à 36 pieds, en déplaçant les arbres en position horizontale. (NdT)↩︎

  15. Homesteading vient de homestead (domicile, propriété), et peut être compris comme un mode de vie autosuffisant, spécifiquement appliqué au lieu de vie. (NdT)↩︎

  16. Los Angeles (2008), Théorie et design à l’ère industrielle (2009), L’Architecture de l’environnement bien tempéré (2011). Traductions Antoine Cazé, préface Frédéric Migayrou, Luc Baboulet, chez HYX. Citons aussi dans les traductions françaises Le brutalisme en architecture (Parenthèses, 2013).↩︎

  17. En français, voir : De Londres à Los Angeles : Récits critiques, 1955-1988 (La Villette, 2004). Voir aussi « Big Doug, Small Pieces », traduit par Antoine Cazé, in C. GEEL. Les grands textes du design. Paris : IFM/Regard, 2019, p. 210-223.↩︎

  18. Les principaux membres en plus de Banham sont Richard Hamilton, Eduardo Paolozzi, Lawrence Alloway, John McHale, William Turnbull, Toni del Renzio, Nigel Henderson, Alison et Peter Smithson, Ronald Jenkins, etc.↩︎

  19. C’est même la profession de foi de ces « jeunes indépendants », qui mènent la vie dure aux caciques Herbert Read et Roland Penrose, fondateurs de l’Institute for Contemporary Art, où ils opèrent ce que l’on pourrait appeler une sorte d’entrisme à partir des années 1952-1953. En produisant des séminaires un peu obscurs, ces jeunes gens préparent en silence l’éclosion d’un pop anglais revigorant et précurseur.↩︎

  20. Voir Reyner Banham Loves Los Angeles (1972) et l’inénarrable K7 Baede-Kar. Sur Vimeo : https://vimeo.com/22488225.↩︎

  21. Voir notice du Frac Centre : https://www.frac-centre.fr/auteurs/rub/ruboeuvres-65.html?authID=49&ensembleID=126&oeuvreID=619.↩︎

  22. In Mary BANHAM, Paul Barker, Sutherland LYALL, Cedric PRICE. A Critic Writes. Essays by Reyner Banham. Berkeley, Los Angeles : University of California Press, 1996, p. xi-xv.↩︎